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Incarner nos valeurs et relever les défis de notre époque

26/10/2023

Écrit par Jean-Étienne Poirier, anthropologue/acériculteur et producteur de contenus

J’ai récemment fait une rencontre qui m’a donné confiance par rapport aux défis qui sont les nôtres en matière environnementale. Ce n’est pas un spécialiste des changements climatiques, ni même un biologiste, un militant ou un autre savant du domaine qui m’a fait cet effet, mais un cuisinier œuvrant à la Souche à Stoneham,Nicolas Horswill.

Sa lorgnette, la fenêtre par laquelle il regarde le monde, c’est celle de la cuisine, de la préparation de nourriture qu’il veut fraîche et appétissante, locale et la plus saine possible. C’est une position qui est simple, mais qui a beaucoup de sens, ne serait-ce que parce que nous mangeons trois fois par jour. Surtout, ce n’est qu’à travers la pratique de son métier, que Nicolas arrive à incarner ses valeurs et à s’inscrire dans quelque chose de plus grand que lui. Ça m’a touché, car s’il y a un sentiment partagé à notre époque, c’est celui de l’impuissance et Nicolas lui, on sent bien qu’il a l’impression de faire une petite différence et qu’il est plutôt optimiste. Quand on lui parle d’avenir, il est convaincu que nous ne sommes pas dans un cul-de-sac, mais plutôt dans un point de bascule. Par définition, ce genre de passage peut nous emmener dans plusieurs directions. Pourquoi est-ce que ça ne pourrait pas être dans une direction moins anxiogène et plus inspirante, plus positive, plus constructive?

Je pense avoir compris qu’un aspect permettant à Nicolas d’avoir cette posture motivante, c’est qu’en plus de son travail aux cuisines, il s’affaire à l’entretien du jardin de la Souche. C’est cet à-côté qui lui permet de s’inscrire dans une démarche lui faisant sentir qu’il contribue à un certain effort pour changer les choses. Avoir la possibilité de servir des aliments frais, des produits qui n’ont pas voyagé, qui n’ont pas été aspergés d’insecticides ou d’herbicides, c’est le petit bout qui lui permet de penser qu’il fait un peu partie de la solution.

Est-ce que Nicolas croit que le monde va changer parce qu’une microbrasserie à Stoneham cultive une partie de ce qu’il sert en cuisine ? Bien sûr que non, mais un pareil jardin exposé à la vue de la clientèle, ça donne des idées et, de cette initiative, deux, trois, quatre jardins de plus se mettront en place dans la municipalité et, un jour, une masse critique de jardiniers arriveront à donner de l’élan à un mouvement. Il n’y a pas de secret, pour qu’une communauté puisse avoir accès à une nourriture saine et locale, elle doit s’y activer. Et depuis quelques années, on peut donner raison à Nicolas, on semble être dans un point de retournement, un point de bascule.

Après avoir prédit pendant des années que notre région ne deviendrait qu’une banlieue de plus, sur la carte de l’agglomération de la ville de Québec, on a vu apparaître plusieurprojets agricoles de différentes envergures : les Jardins de la résilience et la Ferme des Cantons à St-Adolphe, les Jardins du Détour à Stoneham et, plus récemment, les Jardins du Nique à Tewkesbury. Plusieurs petites exploitations acéricoles sont également apparues et, dès 2024, c’est un premier centre de bouillage de sirop d’érable qui sera mis en construction dans la vallée de Tewkesbury. C’est dans cet esprit qu’est également née la Foire Agroforestière de Stoneham-et-Tewkesbury qui a tenu sa deuxième édition cet automne. Autant d’initiatives qui vont dans le sens d’un nouveau rapport au territoire, un rapport plus respectueux, conscient du fait que les forêts qui nous entourent ne constituent pas qu’un décor : elles garantissent la pureté de notre eau, fournissent des matériaux pour nos habitations et de plus en plus de nourriture, comme les champignons, le sirop d’érable, des pousses et plus encore, que nous découvrons dans un esprit de nouveauté alors que ces ressources sont là depuis toujours. Rien n’a changé, si ce n’est que notre regard qui, tranquillement, s’affute pour discerner le fait que nous vivons au milieu de trésors…

Échanger avec Nicolas m’a invité à me dire que nous avons tous ce petit trait d’union que l’on peut ajouter dans nos vies, un petit plus qui peut permettre de relier notre métier aux autres de manière significative afin de contribuer à la mise en place d’une culture plus reconnaissante face à la nature, plus bienveillante face à notre avenir.

Visionner la capsule vidéo portant sur ce sujet, visitez le site de notre partenaire: Le Goût du territoire 

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